L’augmentation de capital constitue l’une des opérations les plus courantes dans la vie d’une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU). Cette procédure permet à l’associé unique de renforcer les fonds propres de sa société, d’améliorer sa crédibilité financière auprès des partenaires ou encore de préparer l’entrée de nouveaux investisseurs. Contrairement à une idée reçue, l’augmentation de capital en SASU ne se limite pas à un simple apport d’argent : elle peut également s’effectuer par apport en nature ou par incorporation de réserves. Chaque modalité implique des formalités spécifiques qu’il convient de respecter scrupuleusement pour garantir la validité juridique de l’opération.

Les enjeux financiers et stratégiques de cette démarche nécessitent une approche méthodique. En effet, une augmentation de capital mal exécutée peut entraîner des conséquences juridiques importantes, allant de la nullité de l’opération à la responsabilité personnelle du dirigeant. C’est pourquoi maîtriser les aspects procéduraux devient essentiel pour tout chef d’entreprise souhaitant développer sa SASU dans un cadre légal sécurisé.

Modalités légales de l’augmentation de capital dans une SASU selon le code de commerce

Le Code de commerce encadre strictement les modalités d’augmentation de capital dans les SASU, particulièrement aux articles L227-1 et suivants. Ces dispositions légales définissent trois mécanismes principaux : l’apport en numéraire, l’apport en nature et l’incorporation de réserves. Chaque modalité répond à des objectifs spécifiques et implique des contraintes juridiques distinctes que vous devez parfaitement maîtriser.

L’apport en numéraire représente la forme la plus classique d’augmentation de capital. Il consiste à injecter de nouveaux fonds dans la société, soit par l’associé unique existant, soit par de nouveaux investisseurs qui deviendraient alors co-associés (transformant ainsi la SASU en SAS). Cette opération nécessite impérativement que le capital social initial soit intégralement libéré avant toute nouvelle augmentation. Les fonds apportés doivent être déposés dans les 8 jours suivant leur réception sur un compte bancaire bloqué ou chez un notaire.

L’apport en nature permet d’augmenter le capital par la mise à disposition de biens corporels ou incorporels : matériel informatique, véhicules, brevets, marques, ou encore immeubles. Cette modalité présente l’avantage de ne pas nécessiter de liquidités immédiates. Cependant, elle impose la désignation d’un commissaire aux apports dès que la valeur d’un bien dépasse 30 000 euros ou lorsque l’ensemble des apports en nature représente plus de 50% du capital social après augmentation.

L’incorporation de réserves constitue une technique purement comptable qui transforme les bénéfices non distribués en capital social, renforçant ainsi la structure financière sans apport extérieur.

Cette dernière modalité se révèle particulièrement intéressante pour les SASU ayant accumulé des réserves importantes. Elle permet d’afficher un capital social plus élevé, améliorant la crédibilité de l’entreprise auprès des banques et partenaires commerciaux. Néanmoins, cette opération réduit d’autant la capacité de distribution future de dividendes, les montants incorporés ne pouvant plus être distribués librement.

Assemblée générale extraordinaire : procédure de décision pour l’augmentation de capital SASU

Contrairement aux SAS classiques, la SASU ne connaît pas d’assemblée générale au sens traditionnel puisque l’associé unique détient l’intégralité du pouvoir de décision. Cette spécificité simplifie considérablement la procédure, mais n’en supprime pas pour autant les obligations formelles. L’associé unique doit respecter certaines étapes procédurales pour garantir la validité de sa décision d’augmentation de capital.

Convocation de l’associé unique et formalités préalables obligatoires

Bien que paradoxal, le concept de « convocation » en SASU répond à une logique juridique précise. L’associé unique doit formaliser sa volonté de délibérer sur l’augmentation de capital en respectant les modalités prévues par les statuts. Ces derniers peuvent prévoir un délai de réflexion minimal ou imposer certaines conditions préalables. La plupart des statuts de SASU prévoient simplement que l’associé unique peut prendre ses décisions « à tout moment », mais certains modèles plus sophistiqués imposent un formalisme particulier.

Avant toute décision, vous devez rassembler l’ensemble des documents nécessaires à l’évaluation de l’opération : états financiers récents, évaluation des biens en cas d’apport en nature, ou encore analyse de l’évolution des réserves disponibles. Cette phase préparatoire conditionne la qualité de la décision et sa conformité aux intérêts sociaux. Un dossier incomplet peut compromettre la validité juridique de l’ensemble de la procédure.

Rédaction du procès-verbal d’assemblée générale extraordinaire conforme

Le procès-verbal constitue l’acte juridique fondamental qui matérialise la décision d’augmentation de capital. Sa rédaction obéit à des règles précises qui garantissent sa valeur probante et sa conformité au droit des sociétés. Le document doit impérativement mentionner l’identité de l’associé unique, la date et le lieu de la décision, ainsi que l’ordre du jour détaillé de la délibération.

Le contenu substantiel du procès-verbal comprend plusieurs éléments obligatoires : la constatation de la régularité de la convocation (même symbolique en SASU), la vérification du quorum (automatiquement atteint par la présence de l’associé unique), l’exposé des motifs justifiant l’augmentation de capital, et la description précise des modalités retenues. Chaque résolution doit être formulée de manière claire et précise, en évitant toute ambiguïté qui pourrait ultérieurement compromettre la validité de l’opération.

Vote et adoption de la résolution d’augmentation de capital social

Le vote de l’associé unique revêt un caractère automatique mais non moins important sur le plan juridique. La résolution d’augmentation de capital doit être adoptée selon les règles de majorité prévues par les statuts. En pratique, l’associé unique disposant de 100% des droits de vote, toute résolution qu’il approuve est automatiquement adoptée. Cependant, certaines situations particulières peuvent compliquer cette apparente simplicité.

Lorsque l’augmentation de capital s’accompagne d’une modification de la valeur nominale des actions existantes, l’unanimité devient théoriquement requise. Cette exigence, héritée du droit des SAS pluripersonnelles, conserve sa pertinence en SASU dans la mesure où elle protège les droits acquis de l’associé unique. De même, si l’opération implique l’entrée de nouveaux associés, les statuts peuvent prévoir des clauses d’agrément que l’associé unique devra respecter, même vis-à-vis de lui-même.

Fixation du prix d’émission et de la prime d’émission des actions nouvelles

La détermination du prix d’émission des actions nouvelles constitue un enjeu économique et juridique majeur. Ce prix se décompose entre la valeur nominale (incorporée au capital social) et la prime d’émission (comptabilisée en réserves). L’associé unique dispose d’une liberté importante pour fixer ces montants, sous réserve de respecter certaines contraintes légales et de ne pas porter atteinte aux intérêts sociaux.

La prime d’émission permet de tenir compte de la valeur réelle de l’entreprise au moment de l’augmentation de capital. Elle évite ainsi une dilution excessive de la participation de l’associé unique lorsque de nouveaux investisseurs entrent au capital. Le calcul s’effectue généralement selon la formule : (Valeur réelle par action – Valeur nominale) × Nombre d’actions émises. Cette approche garantit une valorisation équitable et protège les intérêts préexistants.

Modification statutaire et mise à jour des statuts de la SASU

L’augmentation de capital entraîne automatiquement une modification des statuts de la SASU, puisque le montant du capital social y figure expressément. Cette mise à jour ne constitue pas une simple formalité administrative, mais un acte juridique à part entière qui conditionne l’opposabilité de l’opération aux tiers. La modification statutaire doit intervenir concomitamment à la réalisation effective de l’augmentation de capital pour garantir la cohérence juridique de l’ensemble.

Rédaction de l’avenant aux statuts pour intégrer le nouveau capital social

L’avenant statutaire constitue le véhicule juridique de la modification du capital social. Sa rédaction requiert une attention particulière pour éviter toute incohérence avec les dispositions existantes. L’avenant doit préciser l’ancien montant du capital, le nouveau montant après augmentation, ainsi que la nouvelle répartition des actions si celle-ci évolue. Il convient également de mettre à jour les articles relatifs à la composition du capital et aux droits attachés aux actions.

La technique rédactionnelle la plus sûre consiste à remplacer intégralement l’article des statuts concerné plutôt que de se contenter d’une modification partielle. Cette approche évite les risques de contradiction ou d’interprétation ambiguë. L’avenant doit également mentionner la date d’effet de la modification, généralement fixée au jour de la réalisation définitive de l’augmentation de capital. Une datation erronée peut créer des difficultés lors des contrôles administratifs ou des audits ultérieurs.

Signature des statuts modifiés par l’associé unique ou le président

La signature de l’avenant statutaire matérialise l’accord définitif de l’associé unique sur la modification envisagée. Cette formalité revêt une importance cruciale car elle conditionne l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. En SASU, deux options s’offrent généralement : la signature par l’associé unique lui-même, ou la signature par le président de la société si les statuts lui confèrent ce pouvoir.

La première solution présente l’avantage de la simplicité et de la sécurité juridique maximale. L’associé unique, en tant que propriétaire exclusif de l’entreprise, dispose naturellement du pouvoir de modifier les statuts. La seconde option, plus complexe, nécessite une habilitation expresse dans les statuts originaux ou une procuration spécifique. Elle peut s’avérer pratique lorsque l’associé unique ne peut pas être physiquement présent pour la signature, mais elle impose des précautions supplémentaires pour éviter tout contentieux ultérieur.

Archivage légal des anciens statuts selon les dispositions du code de commerce

L’obligation d’archivage des anciens statuts découle de l’article L123-22 du Code de commerce, qui impose aux sociétés de conserver l’ensemble de leurs actes constitutifs et modificatifs pendant trente ans. Cette contrainte légale présente un intérêt pratique évident : elle permet de reconstituer l’historique juridique de la société et de justifier l’évolution de son capital social auprès des administrations ou des partenaires.

L’archivage doit s’effectuer selon des modalités précises qui garantissent l’intégrité et l’accessibilité des documents. Les statuts originaux doivent être conservés sous leur forme authentique (papier ou électronique selon le mode de signature initial), accompagnés de tous les avenants successifs. Une numérotation chronologique des versions facilite leur exploitation ultérieure et évite les confusions. Cette organisation documentaire se révèle particulièrement précieuse lors des opérations de due diligence ou des contrôles fiscaux.

Déclaration modificative M2 auprès du greffe du tribunal de commerce

La déclaration modificative M2 constitue l’acte administratif qui rend l’augmentation de capital opposable aux tiers et met à jour les informations légales de la SASU. Cette formalité, obligatoire sous peine de sanctions pénales, doit être accomplie dans un délai d’un mois suivant la réalisation effective de l’opération. Le formulaire M2 a évolué avec la dématérialisation des procédures et s’effectue désormais exclusivement par voie électronique via le guichet unique des formalités d’entreprises.

Le dossier de déclaration comprend plusieurs pièces justificatives dont la fourniture conditionne l’acceptation du dossier par le greffe. L’exemplaire du procès-verbal d’assemblée générale, certifié conforme par le représentant légal, constitue la pièce maîtresse qui prouve la réalité de la décision d’augmentation. Les statuts mis à jour, également certifiés conformes, permettent au greffe de vérifier la cohérence entre la décision prise et sa traduction statutaire.

L’attestation de dépôt des fonds, délivrée par la banque ou le notaire dépositaire, justifie la réalisation effective des apports en numéraire. Cette pièce revêt une importance particulière car elle conditionne la libération des fonds et leur mise à disposition de la société. En cas d’apport en nature, le rapport du commissaire aux apports doit également être joint au dossier, accompagné du récépissé de son dépôt préalable au greffe.

Les frais de greffe pour une déclaration modificative M2 s’élèvent à 188,81 euros TTC en 2024, incluant les émoluments du greffe, les frais de publicité au BODACC et la TVA applicable.

Le traitement du dossier par le greffe s’effectue généralement sous 24 à 48 heures en l’absence d’anomalie. Une fois la déclaration validée, le greffe procède automatiquement à la publication d’un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC), rendant ainsi l’opération opposable aux tiers. Un nouvel extrait K-bis, mentionnant le capital social actualisé, devient alors disponible et peut être demandé pour justifier de la nouvelle situation juridique de la société.

Publication légale de l’augmentation de capital dans un journal d’annonces légales

La publication dans un journal d’annonces légales constitue une obligation légale incontournable qui participe à l’information des tiers sur l’évolution

de la structure du capital de la SASU. Cette publication doit intervenir dans un délai d’un mois suivant la décision d’augmentation de capital et respecter des règles de forme strictes pour garantir sa validité juridique. Le choix du journal d’annonces légales s’effectue en fonction du département du siège social de la société, chaque département disposant de sa propre liste de publications habilitées.

L’annonce légale d’augmentation de capital doit contenir des mentions obligatoires définies par la réglementation. La dénomination sociale de la SASU doit figurer en toutes lettres, accompagnée éventuellement de son sigle ou nom commercial. La forme juridique « Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle » doit être précisée, suivie le cas échéant de la mention « à capital variable » si cette caractéristique a été prévue dans les statuts originaux.

Le contenu informationnel comprend l’indication de l’ancien montant du capital social, du nouveau montant après augmentation, ainsi que de l’adresse complète du siège social. Le numéro SIREN doit être mentionné, suivi de l’indication « RCS » et du nom de la ville où la société est immatriculée au registre du commerce et des sociétés. Ces éléments permettent l’identification précise de la société concernée par l’opération.

La publication d’une annonce légale d’augmentation de capital coûte généralement entre 150 et 300 euros selon la longueur du texte et le journal choisi, représentant environ 0,20 euro par caractère.

La description de l’opération elle-même nécessite de préciser la nature de la modification du capital (apport en numéraire, en nature ou incorporation de réserves), ainsi que la modalité technique retenue (création de nouveaux titres ou augmentation de la valeur nominale). L’organe ayant pris la décision d’augmentation doit être désigné, généralement « l’associé unique » en SASU, accompagné de la date de la décision et de sa date d’effet si elle diffère.

Enregistrement comptable de l’augmentation de capital selon le plan comptable général

L’enregistrement comptable de l’augmentation de capital obéit aux règles du Plan comptable général et conditionne la régularité des comptes annuels de la SASU. Cette étape technique revêt une importance cruciale car elle matérialise juridiquement l’opération dans les livres de la société et permet de justifier l’évolution de la situation financière auprès des tiers. Les écritures comptables varient selon la modalité d’augmentation retenue et doivent respecter les principes de régularité, sincérité et image fidèle.

En cas d’augmentation de capital par apport en numéraire, l’écriture de souscription constate l’engagement des apporteurs avant même la libération effective des fonds. Le compte 4562 « Associés – comptes d’apport en société » est débité du montant total de l’augmentation, tandis que les comptes 1013 « Capital souscrit non appelé » et 1012 « Capital souscrit appelé non versé » sont crédités selon la répartition entre la partie appelée et la partie non appelée. Cette comptabilisation permet de distinguer clairement les engagements pris des versements effectués.

La libération des apports donne lieu à une seconde écriture qui constate l’entrée effective des fonds dans la société. Le compte 512 « Banque » est débité du montant versé, tandis que le compte 1012 « Capital souscrit appelé non versé » est crédité d’un montant équivalent. Lorsque la libération est intégrale, une écriture complémentaire transfère le solde du compte 1013 vers le compte 101 « Capital » pour constater la réalisation définitive de l’augmentation.

Les apports en nature nécessitent un traitement comptable spécifique qui tient compte de la nature des biens apportés. Chaque actif reçu fait l’objet d’un enregistrement au débit du compte de bilan correspondant (compte de classe 2 pour les immobilisations, compte de classe 3 pour les stocks, etc.) pour sa valeur d’apport déterminée par le commissaire aux apports. Le crédit s’effectue simultanément au compte 101 « Capital » pour constater l’augmentation du capital social. Cette méthode garantit l’équilibre comptable et la traçabilité de l’opération.

L’incorporation de réserves se traduit par une simple écriture de virement interne qui ne modifie pas le total des capitaux propres mais en modifie la répartition. Les comptes de réserves concernés (1061 « Réserve légale », 1068 « Autres réserves » ou 120 « Résultat de l’exercice ») sont débités du montant incorporé, tandis que le compte 101 « Capital » est crédité d’un montant équivalent. Cette opération améliore la présentation du bilan en renforçant visuellement les fonds propres stables de l’entreprise.

La gestion de la prime d’émission requiert une attention particulière lorsque le prix d’émission des actions nouvelles excède leur valeur nominale. Le compte 1041 « Primes d’émission » est crédité de la différence entre le prix de souscription et la valeur nominale, tandis que le compte 101 « Capital » ne retrace que la valeur nominale des actions émises. Cette distinction comptable permet de préserver la lisibilité de l’évolution du capital social stricto sensu tout en enregistrant la totalité des apports reçus.

Les écritures comptables d’augmentation de capital doivent être accompagnées de pièces justificatives probantes qui permettront de valider leur régularité lors des contrôles. Le procès-verbal d’assemblée générale, l’attestation de dépôt des fonds, le rapport du commissaire aux apports le cas échéant, et l’attestation de parution de l’annonce légale constituent les justificatifs indispensables. Cette documentation facilite également les travaux du commissaire aux comptes et renforce la sécurité juridique de l’ensemble de l’opération.