La comptabilité d’une entreprise individuelle représente un enjeu crucial pour la pérennité et la conformité de votre activité professionnelle. Contrairement aux idées reçues, tenir une comptabilité rigoureuse ne constitue pas seulement une obligation légale, mais également un outil de pilotage indispensable pour optimiser vos performances financières. Cette gestion comptable permet de suivre précisément vos flux de trésorerie, d’anticiper les échéances fiscales et de prendre des décisions éclairées concernant le développement de votre entreprise.
L’organisation comptable d’une entreprise individuelle varie considérablement selon le régime fiscal choisi, le secteur d’activité et le niveau de chiffre d’affaires réalisé. La maîtrise des obligations comptables devient alors déterminante pour éviter les sanctions administratives tout en bénéficiant des avantages fiscaux disponibles. Les entrepreneurs individuels doivent jongler entre simplicité de gestion et respect des contraintes réglementaires, ce qui nécessite une approche méthodique et des outils adaptés.
Obligations légales et réglementaires de la comptabilité en entreprise individuelle
Le cadre juridique de la comptabilité en entreprise individuelle s’articule autour de plusieurs textes fondamentaux, notamment le Code de commerce et le Code général des impôts. Ces dispositions établissent des obligations différenciées selon la nature de l’activité exercée et les seuils de chiffre d’affaires atteints. Chaque entrepreneur individuel doit identifier précisément son régime d’imposition pour appliquer les règles comptables correspondantes.
Régime micro-entreprise et seuils de chiffre d’affaires 2024
Le régime micro-entreprise, couramment appelé auto-entrepreneur, bénéficie d’une comptabilité ultra-simplifiée pour les activités ne dépassant pas les seuils fixés annuellement. En 2024, ces seuils s’établissent à 188 700 euros pour les activités de vente de marchandises, de fourniture de denrées alimentaires et d’hébergement, et à 77 700 euros pour les prestations de services et les activités libérales relevant des BNC.
Cette simplification comptable se traduit par la tenue exclusive d’un livre des recettes chronologique, complété par un registre des achats pour les commerçants. Les micro-entrepreneurs sont dispensés de l’établissement d’un bilan comptable, d’un compte de résultat et de la plupart des déclarations fiscales traditionnelles. Cependant, cette facilité administrative s’accompagne de contraintes spécifiques, notamment l’impossibilité de déduire les charges réelles et l’application d’abattements forfaitaires souvent moins avantageux.
Déclaration contrôlée et régime réel simplifié d’imposition
Les entreprises individuelles dépassant les seuils du régime micro-entreprise relèvent automatiquement du régime réel d’imposition, qui se décline en deux variantes : le régime réel simplifié et le régime réel normal. Le régime réel simplifié concerne les entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas 840 000 euros pour les activités commerciales et 254 000 euros pour les prestations de services.
Ce régime intermédiaire autorise certains allègements comptables, notamment la possibilité de tenir une comptabilité de trésorerie en cours d’année et de ne constater les créances et dettes qu’à la clôture de l’exercice. Les entrepreneurs individuels peuvent également opter pour une évaluation simplifiée des stocks et bénéficier d’une centralisation trimestrielle des écritures comptables. Ces assouplissements facilitent la gestion quotidienne tout en maintenant un niveau d’information financière suffisant.
Conservation des pièces justificatives selon l’article L123-22 du code de commerce
L’article L123-22 du Code de commerce impose une obligation de conservation des documents comptables et des pièces justificatives pendant une durée de dix ans à compter de la clôture de l’exercice. Cette exigence concerne l’ensemble des supports : factures, relevés bancaires, contrats, correspondances commerciales, et tous les documents ayant une incidence sur la détermination du résultat fiscal.
La conservation peut s’effectuer sous format papier ou numérique, à condition de respecter les règles de traçabilité et d’intégrité des données. Les entrepreneurs individuels doivent organiser un archivage méthodique permettant une consultation rapide en cas de contrôle fiscal. La numérisation des documents papier est autorisée sous certaines conditions techniques, notamment la garantie de la lisibilité et de l’authenticité des informations conservées.
Périodicité des déclarations fiscales et sociales obligatoires
Les obligations déclaratives varient considérablement selon le régime fiscal adopté. Les micro-entrepreneurs effectuent des déclarations mensuelles ou trimestrielles de chiffre d’affaires auprès de l’URSSAF, tandis que les entreprises au régime réel déposent annuellement une liasse fiscale complète. Cette liasse comprend la déclaration de résultat n°2031 pour les BIC ou n°2035 pour les BNC, accompagnée des tableaux détaillés justifiant les postes comptables.
La régularité des déclarations fiscales conditionne non seulement le respect des obligations légales, mais influence également la crédibilité financière de l’entreprise auprès des partenaires bancaires et commerciaux.
Mise en place du système comptable et outils de gestion
L’architecture du système comptable d’une entreprise individuelle repose sur le choix d’outils appropriés et leur paramétrage selon les spécificités sectorielles. Cette étape fondamentale conditionne l’efficacité de la gestion comptable quotidienne et la fiabilité des informations produites. Les entrepreneurs disposent aujourd’hui d’une gamme étendue de solutions, depuis les tableurs basiques jusqu’aux logiciels comptables intégrés, en passant par les plateformes cloud spécialisées.
Logiciels comptables dédiés : sage, ciel compta, EBP comptabilité
Les logiciels comptables professionnels offrent des fonctionnalités avancées parfaitement adaptées aux besoins des entreprises individuelles. Sage 50 Comptabilité se distingue par sa robustesse et ses capacités d’intégration avec d’autres modules de gestion. Cette solution permet un paramétrage fin des comptes, une gestion multi-exercices et des fonctions de reporting étendues, particulièrement appréciées par les cabinets comptables.
Ciel Compta constitue une alternative accessible, privilégiant la simplicité d’utilisation sans sacrifier les fonctionnalités essentielles. Son interface intuitive facilite la saisie comptable quotidienne et propose des assistants de paramétrage adaptés aux différents secteurs d’activité. EBP Comptabilité, quant à lui, mise sur la flexibilité et l’adaptabilité, avec des modules complémentaires couvrant la gestion commerciale et la paie. Ces solutions logicielles intègrent généralement des fonctions de télédéclaration et de dématérialisation, réduisant significativement les tâches administratives.
Plan comptable général et adaptation aux spécificités sectorielles
Le Plan Comptable Général (PCG) fournit le référentiel normalisé pour l’enregistrement des opérations comptables. Cependant, chaque secteur d’activité présente des particularités nécessitant des adaptations spécifiques du plan de comptes. Les professions libérales utilisent ainsi des comptes dédiés aux honoraires et aux frais professionnels, tandis que les commerçants intègrent des comptes de stocks et de marchandises.
L’adaptation sectorielle du plan comptable facilite l’analyse financière et améliore la pertinence des indicateurs de gestion. Les entreprises de services privilégient un découpage détaillé des charges externes, permettant un suivi précis des coûts par nature. Les activités industrielles développent une comptabilité analytique intégrée, distinguant les coûts directs et indirects de production. Cette personnalisation du plan comptable s’avère déterminante pour le pilotage opérationnel et l’optimisation de la rentabilité.
Configuration des journaux auxiliaires et grand livre
L’organisation des journaux comptables conditionne l’efficacité de la saisie et la traçabilité des opérations. La configuration standard comprend généralement un journal des ventes, un journal des achats, un journal de banque, un journal de caisse et un journal des opérations diverses. Cette répartition thématique facilite la saisie comptable et accélère les recherches en cas de contrôle.
Le grand livre centralise l’ensemble des mouvements comptables par numéro de compte, offrant une vision synthétique des soldes et des évolutions. Sa structuration doit permettre une consultation rapide et une édition sélective selon les besoins d’analyse. Les journaux auxiliaires spécialisés peuvent être créés pour les opérations récurrentes ou spécifiques à l’activité, comme les frais de déplacement ou les investissements.
Paramétrage de la TVA et des comptes de tiers
Le paramétrage de la TVA constitue un enjeu crucial pour la conformité fiscale et l’optimisation de trésorerie. Les entreprises individuelles doivent configurer les taux de TVA applicables selon leurs activités, en distinguant les ventes soumises au taux normal, réduit ou spécial. La gestion des régimes particuliers, comme la franchise en base de TVA ou l’auto-liquidation, nécessite une attention particulière lors du paramétrage initial.
Les comptes de tiers regroupent les créances clients et les dettes fournisseurs, éléments essentiels du suivi de trésorerie. Leur organisation par échéances et par nature facilite la gestion du poste clients et l’optimisation des délais de paiement. La configuration doit permettre un lettrage automatique des écritures et une édition simplifiée des relances clients. Cette structuration comptable devient particulièrement importante avec la généralisation de la facturation électronique prévue à partir de 2026.
Enregistrement des opérations courantes et écritures comptables
La saisie comptable quotidienne représente le cœur de l’activité comptable d’une entreprise individuelle. Cette tâche requiert une méthodologie rigoureuse pour garantir l’exhaustivité et l’exactitude des enregistrements. Chaque opération économique doit être traduite en écriture comptable respectant le principe de la partie double, où chaque débit correspond à un crédit équivalent. La qualité de cette saisie conditionne directement la fiabilité des états financiers et la pertinence des analyses de gestion.
Les opérations courantes d’une entreprise individuelle comprennent principalement les ventes de biens ou services, les achats de marchandises ou de fournitures, les charges de fonctionnement et les mouvements de trésorerie. Chaque catégorie d’opérations suit des schémas comptables spécifiques, adaptés aux particularités du statut d’entreprise individuelle. Par exemple, les prélèvements personnels de l’entrepreneur s’enregistrent au débit du compte 108 « Compte de l’exploitant », contrairement aux rémunérations des dirigeants de société qui constituent des charges déductibles.
L’enregistrement des factures de ventes nécessite une attention particulière concernant la TVA collectée et les conditions de paiement accordées aux clients. Les entreprises au régime réel d’imposition comptabilisent simultanément la créance client et le produit correspondant, même en l’absence d’encaissement immédiat. Cette comptabilité d’engagement permet un suivi précis des créances et une anticipation des flux de trésorerie futurs. Les entreprises relevant du régime simplifié peuvent opter pour une comptabilité de trésorerie en cours d’année, simplifiant la gestion quotidienne au prix d’une information financière moins détaillée.
Les charges de fonctionnement regroupent l’ensemble des dépenses nécessaires à l’exploitation de l’entreprise : loyers, assurances, fournitures, frais de déplacement, honoraires professionnels. Leur enregistrement doit respecter le principe de séparation des exercices, rattachant chaque charge à la période concernée indépendamment de la date de paiement. Cette règle comptable garantit une mesure correcte de la performance économique de chaque exercice et évite les distorsions temporelles dans l’analyse des résultats.
Gestion de la TVA et déclarations périodiques
La gestion de la TVA constitue l’une des obligations les plus complexes pour les entreprises individuelles assujetties à cette taxe. Le mécanisme de la TVA repose sur un système de collecte auprès des clients et de déduction sur les achats professionnels, générant un solde à verser périodiquement à l’administration fiscale. Cette gestion nécessite une organisation comptable rigoureuse et une veille permanente sur l’évolution de la réglementation fiscale.
Les entreprises individuelles peuvent relever de différents régimes de TVA selon leur chiffre d’affaires et leurs spécificités sectorielles. Le régime de franchise en base exonère les petites entreprises de la déclaration et du paiement de TVA, mais interdit corrélativement la déduction de la TVA supportée sur les achats. Cette option s’avère avantageuse pour les activités à faible coefficient de TVA déductible, mais peut devenir pénalisante en cas d’investissements importants ou de clientèle professionnelle préférant récupérer la TVA.
Le régime réel de TVA impose des déclarations périodiques selon une fréquence déterminée par le niveau de taxe collectée. Les entreprises dont la TVA annuelle excède 4 000 euros déposent des déclarations mensuelles CA3, tandis que les autres peuvent opter pour des déclarations trimestrielles. Le régime simplifié agricole propose une déclaration annuelle CA12, particulièrement adaptée aux activités saisonnières. Chaque régime présente des avantages et inconvénients en termes de trésorerie et de charge administrative.
La maîtrise de la TVA déductible représente un enjeu financier majeur, pouvant générer des économies substantielles sur les investissements et les charges de fonctionnement de l’entreprise individuelle.
La récupération de la TVA déductible obéit à des règles strictes concernant l’affectation des biens et services à l’activité professionnelle. Les dépenses mixtes, partiellement privées et professionnelles, nécessitent un calcul de quote-part dé
ductible selon des critères objectifs et documentés. Les véhicules utilisés à des fins mixtes font l’objet d’un prorata calculé sur la base du kilométrage professionnel, tandis que les frais de réception ou de restaurant subissent des limitations spécifiques. Cette gestion rigoureuse de la TVA déductible nécessite une documentation précise et une traçabilité complète des justificatifs.
Les entreprises individuelles doivent également maîtriser les règles d’exigibilité de la TVA, qui déterminent le moment où la taxe devient due. Pour les livraisons de biens, l’exigibilité intervient généralement lors de la livraison, tandis que pour les prestations de services, elle coïncide avec l’encaissement du prix. Ces règles influencent directement la trésorerie de l’entreprise et doivent être intégrées dans la planification financière. Les acomptes perçus génèrent une exigibilité immédiate de TVA, même en l’absence de livraison définitive.
Clôture comptable annuelle et obligations déclaratives
La clôture comptable annuelle représente l’aboutissement du cycle comptable et constitue une étape cruciale pour l’établissement des comptes annuels et des déclarations fiscales. Cette procédure complexe nécessite une préparation minutieuse et le respect d’un calendrier précis pour éviter les pénalités de retard. Les entreprises individuelles doivent organiser cette clôture en fonction de leur régime fiscal et de la complexité de leurs opérations.
Les travaux de clôture débutent généralement plusieurs semaines avant la date d’arrêté des comptes, par un inventaire physique des stocks et une revue exhaustive des comptes de bilan. Cette phase préparatoire permet d’identifier les régularisations nécessaires et de s’assurer de l’exhaustivité des enregistrements comptables. Les entreprises individuelles doivent porter une attention particulière aux charges à payer et aux produits à recevoir, éléments déterminants pour le calcul du résultat fiscal.
Établissement du bilan comptable simplifié
Le bilan comptable simplifié offre une présentation allégée des comptes annuels, particulièrement adaptée aux petites entreprises individuelles. Cette option permet de réduire significativement les obligations de présentation tout en conservant l’information financière essentielle. Les entreprises éligibles peuvent regrouper certains postes du bilan et bénéficier de dispenses partielles concernant l’annexe comptable.
L’actif du bilan simplifié distingue les immobilisations corporelles, incorporelles et financières, les stocks et en-cours, les créances clients et autres créances, ainsi que la trésorerie disponible. Cette structuration permet une lecture rapide de la situation patrimoniale et facilite l’analyse financière. Le passif regroupe les capitaux propres, incluant le compte de l’exploitant spécifique aux entreprises individuelles, les provisions pour risques et charges, et l’ensemble des dettes classées par échéance.
La valorisation des postes du bilan respecte les principes comptables fondamentaux, notamment le coût historique pour les immobilisations et la valeur nette comptable après amortissements. Les créances douteuses font l’objet de provisions calculées selon leur probabilité de recouvrement, tandis que les stocks sont évalués au plus bas du coût d’acquisition ou de la valeur nette de réalisation. Cette approche prudentielle garantit une image fidèle du patrimoine de l’entreprise individuelle.
Calcul du résultat fiscal et provisions réglementées
Le calcul du résultat fiscal nécessite des retraitements extracomptables pour tenir compte des divergences entre les règles comptables et fiscales. Ces ajustements concernent principalement les amortissements non déductibles, les provisions non admises fiscalement, et les charges somptuaires exclues du résultat imposable. Les entreprises individuelles doivent également réintégrer la rémunération théorique de l’exploitant, non déductible contrairement aux salaires des dirigeants de sociétés.
Les provisions réglementées permettent de différer l’imposition de certains bénéfices sous condition de réinvestissement ou de respect de contraintes spécifiques. La provision pour investissement, par exemple, autorise la déduction anticipée d’acquisitions d’immobilisations planifiées. Ces mécanismes d’optimisation fiscale nécessitent une gestion rigoureuse et le respect de délais stricts pour éviter les reprises fiscales pénalisantes.
L’optimisation du résultat fiscal passe par une planification anticipée des investissements et une utilisation stratégique des provisions réglementées disponibles.
La gestion des déficits fiscaux constitue un enjeu particulier pour les entreprises individuelles en développement ou confrontées à des difficultés conjoncturelles. Ces déficits peuvent s’imputer sur les bénéfices des exercices suivants ou, sous certaines conditions, sur le revenu global du foyer fiscal. Cette flexibilité fiscale représente un avantage significatif du statut d’entreprise individuelle par rapport aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés.
Déclaration 2031 et liasse fiscale pour le régime réel
La déclaration de résultat n°2031 constitue le document de synthèse des entreprises individuelles relevant du régime réel d’imposition BIC. Cette liasse fiscale comprend plusieurs tableaux détaillés permettant à l’administration fiscale d’analyser la situation comptable et fiscale de l’entreprise. La déclaration principale présente le compte de résultat fiscal, tandis que les annexes détaillent les immobilisations, les amortissements, et les provisions.
Le remplissage de cette liasse nécessite une préparation méticuleuse et la vérification de la cohérence entre les différents tableaux. Les erreurs ou omissions peuvent déclencher des contrôles fiscaux ou générer des rappels d’impôts assortis de pénalités. Les entreprises individuelles doivent porter une attention particulière au tableau des plus et moins-values, souvent source de difficultés en raison de la complexité des règles applicables.
La télédéclaration de la liasse fiscale est devenue obligatoire pour la plupart des entreprises, imposant l’utilisation de logiciels compatibles avec les standards EDI-TDFC. Cette dématérialisation accélère le traitement des déclarations et réduit les risques d’erreur de saisie. Les entreprises peuvent ainsi bénéficier de contrôles de cohérence automatisés et d’un accusé de réception électronique sécurisé.
Amortissements linéaires et dégressifs des immobilisations
Les amortissements constituent un mécanisme comptable et fiscal essentiel pour étaler le coût des investissements sur leur durée d’utilisation. L’amortissement linéaire, méthode de référence, répartit uniformément la dépréciation sur la durée de vie économique du bien. Cette approche simple garantit une charge annuelle constante et facilite la planification budgétaire des entreprises individuelles.
L’amortissement dégressif, réservé aux biens d’équipement neufs, permet d’accélérer la déduction fiscale les premières années. Cette méthode génère des économies d’impôt immédiates particulièrement appréciées lors de phases d’investissement intensif. Le coefficient dégressif varie selon la durée d’amortissement : 1,25 pour les biens amortis sur 3 ou 4 ans, 1,75 pour 5 ou 6 ans, et 2,25 au-delà. Cette progressivité vise à favoriser les investissements de long terme.
Certaines immobilisations bénéficient de régimes d’amortissement exceptionnels, comme l’amortissement sur douze mois pour les matériels de sécurité ou de protection de l’environnement. Ces dispositifs incitatifs évoluent régulièrement selon les priorités économiques gouvernementales. Les entreprises individuelles doivent suivre attentivement ces évolutions pour optimiser leurs stratégies d’investissement et maximiser les avantages fiscaux disponibles.
Optimisation fiscale et stratégies patrimoniales pour l’entrepreneur individuel
L’optimisation fiscale de l’entreprise individuelle repose sur une approche globale intégrant les spécificités du statut juridique et les objectifs patrimoniaux de l’entrepreneur. Cette démarche stratégique nécessite une vision prospective et une adaptation permanente aux évolutions réglementaires. Les entrepreneurs individuels disposent d’outils spécifiques pour optimiser leur fiscalité tout en préservant la souplesse de gestion caractéristique de ce statut.
Déduction des charges professionnelles et frais de structure
La déductibilité des charges professionnelles obéit à des critères stricts définis par la doctrine fiscale : les dépenses doivent être engagées dans l’intérêt de l’entreprise, être justifiées par des pièces probantes, et correspondre à une charge effective. Cette triple condition s’applique rigoureusement aux frais de véhicule, de réception, ou d’acquisition de biens pouvant présenter un caractère mixte professionnel et personnel.
Les frais de structure regroupent l’ensemble des charges fixes nécessaires au fonctionnement de l’entreprise : loyers professionnels, assurances, abonnements, charges de personnel. Leur optimisation passe par une analyse coût-avantage de chaque poste et la recherche de solutions alternatives économiquement viables. Le télétravail et les bureaux partagés offrent notamment des opportunités de réduction des frais de structure tout en maintenant l’efficacité opérationnelle.
Les frais de formation professionnelle constituent un investissement déductible particulièrement stratégique pour les entreprises individuelles. Ces dépenses améliorent les compétences de l’entrepreneur tout en réduisant la charge fiscale. La formation doit présenter un lien direct avec l’activité exercée et faire l’objet d’une documentation appropriée. Les formations diplômantes ou qualifiantes bénéficient généralement d’une déductibilité intégrale, contrairement aux formations à caractère personnel ou culturel.
Statut EIRL et protection du patrimoine personnel
L’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL), bien que supprimée depuis 2022, a marqué l’évolution du statut d’entreprise individuelle vers une meilleure protection patrimoniale. Désormais, la loi du 14 février 2022 instaure automatiquement une séparation entre patrimoine professionnel et patrimoine personnel pour toutes les nouvelles entreprises individuelles. Cette protection concerne notamment la résidence principale, automatiquement protégée contre les poursuites des créanciers professionnels.
Cette évolution législative modifie fondamentalement l’approche patrimoniale des entrepreneurs individuels. La protection automatique encourage la création d’entreprise en réduisant les risques personnels, tout en préservant la simplicité de gestion caractéristique du statut. Les entrepreneurs peuvent désormais développer leur activité sans craindre la saisie de leurs biens personnels essentiels, sauf en cas de faute de gestion ou de manquement aux obligations fiscales et sociales.
Cette protection patrimoniale s’accompagne cependant de nouvelles obligations de transparence vis-à-vis des partenaires financiers et commerciaux. Les entreprises individuelles doivent désormais tenir une comptabilité plus rigoureuse et peuvent être contraintes de fournir des garanties spécifiques pour accéder au crédit professionnel. Cette évolution rapproche progressivement le statut d’entreprise individuelle du régime des sociétés unipersonnelles.
Passage en société et seuils de rentabilité fiscale
La transformation d’une entreprise individuelle en société devient pertinente lorsque certains seuils de rentabilité sont atteints. Cette analyse comparative doit intégrer les charges sociales, la fiscalité des bénéfices, et les perspectives de développement de l’activité. Le passage en société génère généralement une optimisation fiscale significative au-delà de 60 000 à 80 000 euros de bénéfice annuel, selon la situation familiale de l’entrepreneur.
La création d’une EURL ou d’une SASU permet de bénéficier de l’impôt sur les sociétés, dont le taux réduit à 15% s’applique sur les premiers 38 120 euros de bénéfice. Cette optimisation s’accompagne d’une plus grande complexité administrative et de coûts de fonctionnement supplémentaires. L’arbitrage entre simplicité et optimisation fiscale doit tenir compte de la charge de travail administratif et des honoraires d’expertise comptable nécessaires.
Le passage en société s’avère généralement avantageux lorsque les bénéfices dépassent durablement 70 000 euros annuels, en tenant compte de l’ensemble des coûts induits par ce changement de statut.
L’apport d’une entreprise individuelle à une société peut bénéficier du régime de faveur des apports, différant l’imposition des plus-values latentes. Cette opération nécessite une évaluation précise des actifs apportés et le respect de conditions strictes pour éviter les remises en cause fiscales. Les plus-values d’apport sont généralement étalées sur cinq ans, lissant l’impact fiscal de la transformation.
Provisions pour investissement et reports déficitaires
Les provisions pour investissement constituent un outil d’optimisation fiscale permettant d’anticiper la déduction d’acquisitions d’immobilisations futures. Cette provision doit correspondre à un projet d’investissement précis, réalisable dans un délai de deux ans, et respecter certains seuils minimum. Les entreprises individuelles peuvent ainsi lisser leur charge fiscale en provisionnant les années de forte rentabilité les investissements des exercices suivants.
Le mécanisme de report déficitaire offre une flexibilité particulière aux entreprises individuelles soumises à l’impôt sur le revenu. Les déficits professionnels peuvent s’imputer sur le revenu global du foyer fiscal, générant une économie d’impôt immédiate. Cette particularité s’avère particulièrement avantageuse pour les entrepreneurs disposant d’autres sources de revenus ou dont le conjoint perçoit des revenus salariés substantiels.
La gestion optimale des reports déficitaires nécessite une planification pluriannuelle tenant compte de l’évolution prévisible de l’activité et de la situation familiale. Les déficits non imputés sur le revenu global peuvent être reportés sur les bénéfices professionnels des dix exercices suivants, offrant une souplesse de gestion appréciable. Cette faculté de report distingue favorablement l’entreprise individuelle des régimes micro-entreprise, qui ne permettent aucune imputation déficitaire.